Grand Prix des Lycéennes de ELLE
Mars 2016
Les gens dans l’enveloppe de Isabelle Monnin avec Alex Beaupain. JC Lattès, 2015
Les gens dans l’enveloppe est un roman qui offre de nombreuses variations et explore les genres et les styles : grâce à un album de photographies d’illustres inconnus, Isabelle Monnin crée une histoire sortie tout droit de son imagination, une histoire à la suite de laquelle elle mène une enquête, pour au final trouver la vérité sur ces photographies. L’ouvrage est complété par un album de plusieurs chansons écrites par Alex Beaupain. C’est une sorte de roman multifonction, où l’on découvre plusieurs intrigues.
La partie histoire du roman est vraiment très intéressante et bien rédigée, on se rend compte qu’Isabelle Monnin s’appuie sur plusieurs styles d’écriture et des formes variées : la calligraphie, les poèmes, les lettres, la narration… Le fait que l’histoire soit découpée en plusieurs parties, chacune correspondant à l’un des personnages principaux, fait ressentir les différentes émotions de chacun, et tout cela est rédigé d’une plume si légère que j’ai totalement accroché au roman. On a l’impression que les personnages, pourtant fictifs, nous font part de leurs sentiments, de leurs craintes et de leurs joies, qu’ils cherchent à nous toucher personnellement.
La partie enquête est elle aussi très intéressante, nous faisant découvrir les vraies personnes sur les photos, et donc nous permettant de comparer l’idée que s’était faite Isabelle Monnin de ces gens-là à la réalité, qui n’est pas forcément aussi douce qu’elle l’aurait espéré.
Les paroles de chaque chanson, inspirées par le roman et la vie des personnages, m’ont aussi énormément plu. Elles sont douces et joliment écrites, joliment chantées.
Ce qui m’a beaucoup touché dans ce livre est le fait de convier plusieurs arts dans une seule et même œuvre : on y retrouve tout d’abord la photographie, comme le « tronc » principal qui a fait pousser l’œuvre : les écrits, les poèmes, les chansons, les témoignages, la recherche et les liens créés entre les « vrais gens dans l’enveloppe » seraient les branches de cet arbre. Un arbre ayant très bien grandi pour créer un roman si original et intéressant.
Alicia B
Someone de Alice McDermott. Quai Voltaire, 2015
Dans ce livre, on suit la vie de Marie, une jeune fille vivant à Brooklyn à partir des années 1930 avec sa famille : son père, sa mère, et son frère Gabe, se destinant à la prêtrise.
Marie raconte, une fois adulte, ses souvenirs d'enfance, ses premières expériences, sa vie de famille… On découvre les pensées d'une petite fille de sept ans, d'une grande timidité et ne parlant à personne d'autre que sa famille et ses amies. Toute petite, Marie a été confrontée à la mort, celle de sa voisine, Pegeen. Plus tard, après la mort de son père et une grosse déception amoureuse, elle travaillera dans un funérarium. Puis la mort d'un vieil homme de son quartier, et plus tard, celle de sa mère ponctuent sa vie. La mort est comme un fil conducteur dans cette histoire. Mais ce n'est pas le seul thème important dans ce roman. On voit aussi la découverte de l'amour et de la sexualité par une jeune femme dans une société américaine encore assez conservatrice. L'amour familial, et particulièrement l'amour fraternel, est également très présent.
J'ai apprécié ce roman. Je trouve l'histoire de cette vie touchante. On y suit les aventures, les découvertes, les joies, les peines d'une enfant devenue adolescente puis femme. J'ai bien aimé le fait que l'histoire ne soit pas racontée chronologiquement. Parfois, particulièrement à partir de la deuxième partie, les souvenirs s’emmêlent. Le style d'écriture est très fluide, comme si Marie était avec nous et nous contait son histoire. C'est un beau roman, émouvant et sincère.
En revanche, il m'a fallu un bon moment pour réussir à m'accrocher à l'histoire et m'y plonger. Le début du roman traîne en longueur et n'est pas toujours parfaitement compréhensible, comme si Marie nous transmettait sa vision floue de petite fille à lunettes. Bien que la vie de Marie soit touchante, elle n'a rien de captivant et est assez monotone : c'est la vie d'une madame tout le monde, comme vous et moi, de « someone ».
Adèle
Ce roman, qui peut sembler à première vue peu accrocheur, vous emporte dans l’ambiance et l’univers de ces immigrés irlandais en Amérique. On s’attache aux personnages et on comprend le titre : la vie de « quelqu’un » mérite de devenir le sujet d’un roman.
Alicia M
Une vie entière de Alice McDermott. Quai Voltaire, 2015
Ce roman relate la vie d'Andreas Egger, né à la fin du 19e siècle. On y découvre l’évolution de ce jeune orphelin qui devient un homme : ses peines, ses joies, dans un paysage d’Alpes autrichiennes.
J'ai trouvé que la vie d'Andreas était assez dramatique, son enfance en particulier. Le lecteur assiste à des scènes marquantes, comme, quand, par exemple Andreas se retrouve boiteux à cause des coups qu'il reçoit de son «père» adoptif. Cette enfance difficile donne toute la profondeur au personnage, et c'est assez extraordinaire de voir le parcours d'un homme qui a su se construire malgré ses faiblesses et son passé. On remarque ainsi que les blessures du passé ne se referment jamais et que l'enfance fait partie intégrante du développement de la vie adulte. Les moments douloureux laissent des traces et Andreas garde une certaine méfiance et une certaine crainte du contact humain. C’est un homme dans le fond sensible, droit et intelligent.
Derrière le personnage d’apparence simple, on découvre l'image meurtrie de l'Autriche, de l’histoire, des deux guerres, du nazisme. Andreas s’engage dans la guerre avec la conviction de se battre pour sa patrie mais il en revient désillusionné car meurtri, voire traumatisé, comme la population autrichienne à cette époque.
J'ai apprécié aussi ce rapport intime qu'Andreas a avec la nature, les paysages qui sont décrits comme des humains et les descriptions poétiques de cet univers neigeux. Au début, l’auteur décrit un environnement sauvage, à part, presque coupé du monde puis, le paysage va évoluer pour répondre aux attentes du tourisme. En effet, le portrait de cet homme se double de la description de l'évolution de la société et des mœurs : la montagne devient loisir et s’éloigne de la vision Andreas qui la perçoit comme une beauté pure et simple, une confidente et un témoin de sa solitude.
Par ailleurs, Andreas et sa femme vivent une relation belle et forte. La pudeur dans leur relation ainsi que la discrétion qui émane des deux personnages donnent une preuve de leur amour sincère. Mais malheureusement, le bonheur simple d'Andreas lui est arraché par la mort tragique de Marie, une épreuve encore difficile pour Andreas. Ils se sont séparés sans avoir eu le temps de s'être assez aimés.
En définitive, l'auteur apporte à cette histoire, grâce à son style d'écriture, une finesse, une simplicité et une véritable poésie, comme si les mots coïncidaient avec la douleur et la vie d'Andreas.
Fanny
Nous assistons en même temps qu’Andreas aux changements du monde qui l’entoure, la guerre fait rage, il est éloigné de son pays pendant des années. A son retour du front, tout a changé les montagnes, ses montagnes dans lesquelles il a grandi sont envahies par les touristes. Que dire sur ces paysages magnifiquement décrits par l’auteur ? On arrive à visualiser les Alpes telles qu’Andreas les perçoit. Le style d’écriture de l’auteur marque par sa simplicité, parfois même par sa poésie et c’est que qui fait toute la beauté de ce livre. L’auteur nous dresse le portrait d’un homme simple, courageux et bouleversant. Ce livre est une véritable leçon de vie !
Alicia M
Robert Seethaler a, dans ce roman, une manière bien à lui de décrire l’environnement dans lequel s’avance Andreas. Il y a un rapport très présent à la nature enneigée, aux paysages givrés, à la montagne à la fois protectrice et menaçante…
Alicia B